Elle s’appelle Aaliya Saleh, elle a 72 ans, elle n’est pas toujours experte quand elle fait sa colo : ses cheveux sont bleus à présent, heureusement, elle a une santé de fer lui affirme son médecin, de fer rouillé précise-t-elle.
Aaliya n’a pas de téléphone portable, personne ne l’appelle, elle est seule, et c’est son choix… « Un choix qui tient compte du peu d’autres options disponibles. La société beyrouthine n’appréciait pas les femmes divorcées sans enfant en ce temps-là »…
Mariée à 16 ans, retirée aussitôt de l’école, son mari impuissant la répudie quatre ans après leur mariage qui n’a salué la naissance d’aucun enfant. Pour subsister, elle trouve un emploi dans une librairie de Beyrouth. Elle y restera des dizaines d’années.
Parce que la littérature est son refuge, son plaisir aveugle. L’air qu’elle respire.
Les murs de son vieil appartement sont d’ailleurs tapissés de livres, de cartons remplis de papiers, de feuilles volantes, celles avec les traductions qu’elle commence rituellement chaque année le premier janvier, les traductions en arabe de ses auteurs préférés, Kafka, Pessoa ou Nabokov.
Rabih Alameddine propose un somptueux portrait de femme : une femme qui n’a jamais accepté de se laisser enfermer dans le carcan de la société libanaise qui pouvait se montrer très cruelle avec une femme seule.
Aaliya, qui ne s’est jamais soumise.
A personne, et encore moins à la religion.
Sa religion à elle, c’est la littérature : son seul amour.
Les jurés ne sont pas trompés en lui décernant le prestigieux Prix Fémina Etranger 2016.
Ce roman est absolument éblouissant.
Ne passez pas à côté.