Gustavo Santini, la quarantaine, né à Buenos Aires, naturalisé français. Profession : directeur financier. Etat civil : marié à Sophie, deux enfants. Une existence heureuse et absolument sans histoire.
Gustavo s’apprête à vivre une journée importante dans sa carrière : il doit présenter un projet à sa direction générale, et il a besoin de toutes ses heures de sommeil pour être en forme.
Quand il entend tambouriner à sa porte à six heures du matin, il se demande qui peut bien vouloir le réveiller. Il se lève, s’habille maladroitement et entend ceci : « Police, ouvrez, ou nous forçons la serrure. »
Plus inquiet qu’agacé Gustavo s’interroge sur la raison de ce chahut matinal. « La police ? Mais pourquoi ? A cette heure ? Un accident dans son entourage ? Qui ? … «
Le commandant Michel Defils de la DRPJ de Versailles le met très vite au courant, alors que des policiers perquisitionnent toute la maison sous les yeux ébahis de son épouse et des enfants.
Trois ans plus tôt, sur le parking d’un centre commercial, une adolescente a fait l’objet d’une tentative d’enlèvement. Son père a essayé d’arrêter l’auteur. Mal lui en a pris. celui-ci n’a pas hésité à lui foncer dessus avec sa voiture. Le père de la jeune fille est mort sur le coup.
Homicide volontaire. Meurtre en clair.
L’enquête reste au point mort pendant de très longs mois. Personne n’a vu le chauffard, excepté l’adolescente, qui a déclaré qu’il était blond et qu’il portait une veste en jeans. On sait aussi que la voiture était une Mégane blanche.
C’est très maigre comme éléments.
Mais qu’importe pour Michel Defils.
Il a promis à la fille de la victime de retrouver le meurtrier de son père. Il tient enfin une piste, il ne va pas la lâcher…
Comme des milliers de français, Gustavo Santini roule dans une Mégane blanche …
Comme des milliers de français, Gustavo Santini possède une veste en jeans …
Comme des milliers de français, Gustavo Santini est blond …
Pour lui, le cauchemar commence.
Il est emmené au commissariat et placé en garde à vue.
Les policiers aimeraient beaucoup qu’il craque pour consigner des aveux rapidement. « Tout est en place. L’affrontement peut démarrer. Gustavo n’en est pas conscient, encore, mais c’est sa vie toute entière qui est en jeu. Il pense encore avec naïveté qu’il va être en mesure de faire valoir son innocence sur la base d’une conversation rationnelle, et que sa bonne foi finira par l’emporter sur des spéculations sans queue ni tête. Face à lui, les policiers sont comme une meute de hyènes, excitées par l’odeur du sang, attaquant sans relâche une proie blessée, diminuée, chancelante, dont elles savent d’instinct que la résistance ne sera plus que symbolique désormais. »
Pour se défendre, Gustavo ne dit pas grand chose. Il s’effondre tout doucement. Comment se rappeler ce qu’il faisait ce samedi matin-là, il y a trois ans ?
A l’extérieur, la presse, les réseaux sociaux se déchaînent sur lui, sur sa famille …
Son épouse Sophie ne veut pas croire en la culpabilité de l’homme qu’elle aime. Elle va donc tout faire pour prouver son innocence.
Mais comment rétablir la justice dans une société où l’émotion instantanée règne en maître, où les réseaux sociaux désignent les coupables idéaux, et où le quidam vautré dans son divan condamne et cloue au pilori sans rien connaître de l’affaire.
Mathieu Menegaux signe son troisième roman. Un roman fort, incroyablement d’actualité. Un roman qu’on ne lâche pas une seconde. Un roman complètement flippant.
Nous pouvons tous, un jour, nous appeler Gustavo Santini.
Plus que jamais, restons vigilants.